Attention, spoilers !

La plupart des critiques et des développements proposés dévoileront des indices et des informations qui pourraient fausser l'effêt de surprise et révèler les dessous et les résolutions des oeuvres citées ...

A bon entendeur ...


Que cela ne vous empêche pas de me visiter, de me lire et de me laisser vos remarques.

lundi 18 février 2008

Suspiria ( fin )



SUSPIRIA





SUSPIRIA
(4)





La musique est ici également très particulière et la bande son hyper travaillée.
Les Goblins, fidèles acolytes, sont à l'oeuvre.


Le thème principal de "Suspiria ", cristalin et lancinant se révèle véritablement magique et concourt totalement à la réussite et à l'impact du film.
Il traduit tout à fait le merveilleux et l'occulte du propos avec son mélange entêtant de tintements, de tambourins, de chuchotis, de résonnances...
Deux autres thèmes restent mémorables ; le premier marie des instruments ethniques (tablas, sitar, bouzoukis...) et des voix glapissantes qui rappellent les plaintes de chiens ou de loups ; dans le dernier, tout n'est qu'anarchie : des choeurs masculins sombres, ténèbreux, alliés à des hululements féminins hystériques nappés de touches de synthétiseurs pour un ensemble agressif et fou.



Le titre " Suspiria " renvoie à la Mère des soupirs ( du moins, c'est ce que nous pouvons apprendre dans le second volet de cette trilogie ( longtemps inachevée ) : "Inferno" ) : une sorcière très puissante ici prénommée Helena Markos.

La Mère des Ténèbres règne sur New-York ( "Inferno"), la Mère des Larmes sur Rome ( voir " La Terza Madre ") et celle-ci sur Fribourg .


"Suspiria" ce sont aussi ces soupirs, ces chuchotements, ces murmures parsemant constament la bande-son, accompagnant la musique et contribuant à cette atmosphère si spécifique.
Ce sont également ces râles provenant de l'ombre chinoise de la reine-sorcière derrière ses rideaux mais aussi les derniers soupirs rendus par les malheureuses victimes.


Des soupirs mais surtout des cris répètés et aigus comme les lames qui transpercent .


Les motifs de la pointe et de la pénétration se révèlent effectivement omniprésents.
Dès que Suzy quitte l'aéroport, elle "pénètre" d'ors et déjà sur le territoire de la sorcière (le gros plan ( souvent cité ) sur les vérins du système d'ouverture de la porte (une pointe qui rentre dans un trou) souligne déjà cet état de fait ) ;
Pointe non-identifiée frottée par la vieille domestique ; pointes des grosses épingles cruellement fichées dans les yeux et les poignets de Sara ; pointe de la plume du paon de verre avec laquelle Suzy transperce la gorge d'Hélèna Markos ; pointes des danseuses ; pointes des griffes d'une main velue surgie de la nuit ...
Formes pointues et triangulaires (le "témoin" lumineux de l'ascenceur dans l'entrée de l'immeuble baroque où a lieu le premier homicide ;
les motifs ésotériques dans la chambre de la vieille sorcière ;
le triangle du frontispice du batiment antique sur la place d'où un oiseau-gargouille semble fondre sur l'aveugle...)





Et la pénétration.
Pénétration des lames dans la chair, dans un coeur encore battant ;
pénétration du vent, de la pluie et de l'eau par les fenêtres, les bouches humaines (on force Suzy à boire de l'eau après son malaise) et les bouches d'évacuations (lavabo, soupirail, gouttières-gargouilles, toilettes, bouche d'égout...).

Le cheminement de Suzy s'avère d'ailleurs lui-même une pénétration toujours plus en profondeur vers la vérité et la résolution des crimes et des mystères ; un cheminement qui fonctionne par strates : d'abord la ville , la forêt puis l'école ; la chambre d'interne ensuite ; le bureau de la directrice ; le passage-secret et finalement la chambre de la sorcière.





Semblablement cette sorcière aura retiré un à un ses voiles et ses incarnations successives avant de révèler enfin sa réalité de vieille femme multicentenaire et grotesque (Elle aura été tour à tour pluie, oeil phosphorescent, bras velu et griffu , ombre désincarnée et sifflante derrière un drap tendu , ombres et gargouille sur la façade d'un édifice , respiration sans "corporalité", cape noire, chauve-souris, voix ricanante, forme invisible imprimée sur un lit, version "zombifiée" de Sara, coeur et moteur de la confrèrie, flammes hurlantes...)



La reine, une fois exterminée, tous ses disciples meurent semblablement comme parties intrinsèques d'une seule et même entité, et la demeure maléfique explose et brule.



Suzy a juste le temps de s'enfuir.

Son sourire soulagé (et complice ) marque autant l'épuisement et le relachement aprés le cauchemard que le terme de son initiation ; cette fin positive veille en même temps à souligner la merveilleuse et subtile absurdité de tout ce qui a précédé (un conte, un rêve, un film !)


Entrer dans "Suspiria" c'est accepter de s'enfoncer dans un cauchemard flamboyant, un conte violent, sans message ni morale cependant, clinquant, bruyant, superficiel et magnifique !



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