





A cette perception constamment faussée de son héro,
Dario Argento oppose la perception extra-sensorielle, intérieure et "magique", de la médium.
Posant, dès le départ, les bases de l'intrigue et de l'enquête, la voyante a, malgré elle, vu et compris la nature et le passé du meurtrier et l'a démasqué sans même le vouloir.
Helga évoque d'ailleurs "une sensation, aiguisée comme la lame d'un couteau", on ne peut plus révélatrice de ce qu'elle subira deux scènes plus loin ! (elle sera lardée de coups de tranchoir !)


La perception réelle (et quelque peu ésotérique) qu'elle partagera d'ailleurs avec l'écrivain Amanda Rigetti (versée elle aussi dans la parapsychologie, et dans des interrogations plus "sensibles" et intérieures que sensitives et réduites), ouvre l'esprit à la vérité mais, hélas, également, et par là même, à la mort !





C'est un monde d'apparences, de leurres et de surfaces, où les réalités n'ont finalement pour visages que ses multiples interets et ses mensonges.
Les visions et les perceptions "autres", qu'elles soient médiumniques, surnaturelles ou liées à l'alcoolisme ou à la folie (Carlo et sa mère), ne peuvent donc trouver d'issue que dans le meurtre ou le trépas.






Le monde imparfait, subjectif, et soumis aux filtres des sens, forcément trompeurs, n'est pas préparé, n'est pas apte, à cette vérité !

Les visions et les perceptions "autres", qu'elles soient médiumniques, surnaturelles ou liées à l'alcoolisme ou à la folie (Carlo et sa mère), ne peuvent donc trouver d'issue que dans le meurtre ou le trépas.








On retrouve ou découvre ici tout ce qui fera sa singularité, son identité et son succès ; ce que l'on aimera ou détestera immédiatement, viscéralement et pour toujours.
C'est avec ce film que le réalisateur prouvera véritablement sa maturité et sa maitrise, à partir de là qu'il pourra tout se permettre.
Ainsi, ce gout si particulier et si équilibré des oppositions et ce mariage savant des contraires.
L'oeil (celui de la caméra subjective et manipulatrice ; celui tout-puissant et fétichisé de l'assassin ; ceux des fenêtres et des ouvertures de ces maisons, de ces façades, presque vivantes et humanisées ; l'oeil éteint et toujours grand ouvert des cadavres ...) et la "non-vue" (mauvaise perception des personnages ; insaisissabilité du meurtrier ; motif répété des ces protagonistes qui scrutent et cherchent du regard, qui se pressent derrière des vitrages et à la surface des apparences et auxquels échappent tous les détails les plus primordiaux ...) ;


Le petit et le grand (l'utilisation d'une micro-caméra pour magnifier et souligner en gros plans des détails ou des objets signifiants (les fétiches du maniaque...) ; les gros plans sur le magnétophone où se déroule la bande magnétique égrennant le "gimmick" de la funeste comptine ; l'alternance de compositions où les personnages paraissent noyés (et rapetissés) dans des décors vastes et vides, ou étouffés par les architectures, et le grossissement exageré du détail (les notes écrites sur une partition, les gouttes de sueur perlant sur un front, l'éclat rouillé des lames des couteaux ...) ;















Des adultes-enfants (chamailleries perpétuelles de Marcus et Gianna ; policiers infantiles et incapables ; le tueur et tous ses "jouets" ...) et des enfants trop tôt muris (Carlo ; la petite fille du gardien ...) ;



Le vide et le plein ; le noble et le grossier ; le léger (un giallo codifié, les artifices de la mise en scène ...) et le sérieux, le profond : une réflexion sur la manipulation et le sens des images et sur les impératifs , les codes et les règles du cinéma, et leur détournement.













La fluidité du montage épouse celle d'une caméra qui ne cesse de glisser, de tournoyer, de s'insinuer partout, passant par les fenêtres, parcourant l'intérieur d'un piano, rebondissant sur les notes d'une partition, suivant les sillons d'un disque ou les déroulements d'une bande magnétique, montant et descendant, soulignant de son oeil morbide le sang qui perle sur un carreau de faïence, sur le corps encore frémissant, et percé d'une aiguille à tricoter, d'un oiseau, gouttant des lèvres d'un cadavre ou d'une bouche qu'on a fracassée contre les coins d'une table et d'une cheminée, stigmatisant sans cesse l'étrangeté, la poésie et la beauté vénéneuse de la mort.










Les renvois et les allusions, totalement digerés et intégrés, à Hitchcock ("Psychose", "Une Femme disparait" ...), à Antonioni ("Blow up", bien entendu, mais surtout cette insistance sur l'abstraction géométrique, la stylisation et la théatralité des cadrages et de la mise en scène), à Sergio Leone, à Mario Bava ou à Fritz Lang parsèment discrètement toute l'oeuvre.

Tout comme les références aux films précédents ( les trois gialli aux titres "animaliers" des débuts de carrière), cette réorchestration parfaite des images, des préoccupations, des méthodes déjà expérimentées et comme l'introduction des thèmes, des recherches et des orientations futurs.
Ainsi peut-on déjà interpreter le trio des parapsychologues du début du film comme l'amorce de celui des Trois Mères ("Suspiria", le film qui viendra ensuite, était d'ailleurs titré "Les Frissons de l'angoisse 2", lors de sa distribution dans certains pays) ; ainsi les explorations de la maison hantée préfigurent-elles celles de la maléfique TanzAcadémie ...
Ainsi peut-on déjà interpreter le trio des parapsychologues du début du film comme l'amorce de celui des Trois Mères ("Suspiria", le film qui viendra ensuite, était d'ailleurs titré "Les Frissons de l'angoisse 2", lors de sa distribution dans certains pays) ; ainsi les explorations de la maison hantée préfigurent-elles celles de la maléfique TanzAcadémie ...

La bande originale des "Frissons de l'angoisse" est finalement signée par les Goblin (initialement choisi, Giorgio Gaslini n'a pas su répondre aux attentes d'Argento ; il ne subsiste qu'un thème de son travail ). Le film inaugurera une collaboration plus que fidèle et finalement toujours fructueuse et réussie. Le tout jeune groupe de "rock atmosphérique" propose des compositions qui rappellent le travail de Mike Oldfield ou de Tangerine Dream et impriment aux images éblouissantes et inquiétantes du cinéaste l'écho et le pendant, tout en même temps moderne et mélodieux, abstrait, épuré, obsédant et magique, que le film attendait.
Véritable étape dans la filmographie de son auteur, "Les Frissons de l'angoisse" s'affirme, par-delà un cinéma de genre auquel on a toujours réduit et limité l'oeuvre de Dario Argento, comme un sommet, un modèle, une référence (à réhabiliter vraiment !) du Cinéma avec un grand C.
Abouti, maitrisé, généreux, toujours harmonieux et direct, simple d'accès et immédiatement envoutant, ce chef-d'oeuvre se révèle l'une des meilleures introductions possibles à l'univers de son créateur.
Tout est là, brodé dans une passionnante et magnifique alchimie, "Rouge profond" effectivement, avec la suprême élégance de l'humilité en prime !
Abouti, maitrisé, généreux, toujours harmonieux et direct, simple d'accès et immédiatement envoutant, ce chef-d'oeuvre se révèle l'une des meilleures introductions possibles à l'univers de son créateur.
Tout est là, brodé dans une passionnante et magnifique alchimie, "Rouge profond" effectivement, avec la suprême élégance de l'humilité en prime !
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